La mare est généralement considérée comme un petit étang, sans plus [1]. Nous choisirons, ici, d’appeler « mares » les volumes d’eau non courantes et non empoissonnées [2].
Les mares sont parfois naturelles ; elles tendent alors, comme les étangs et les lacs, à se combler progressivement et, dans nos régions, à laisser place à la forêt.
Elles sont le plus souvent d’origine humaine ; ce sont celles qui nous intéressent. Nous pourrions dire « étaient », car les 9/10e ont disparues avec le progrès et le confort moderne : elles servaient de réservoir d’eau pour les incendies, l’abreuvement des animaux, de pédiluve au bétail, la lessive ou la vaisselle, le drainage, le travail du lin ou du chanvre, de l’osier ou de la ronce, de réservoir contre la sécheresse. Les bornes d’incendie et l’eau courante, ainsi qu’un discours hygiéniste souvent justifié, ont amené la disparition des puits, mares et autres flots.
Les mares étaient creusées dans des lieux naturellement imperméables, notamment ceux où l’eau a déjà tendance à s’accumuler ou dans les affaissements de terrain. On accentuait donc la tendance de l’environnement en l’utilisant. On pouvait aussi essayer de contraindre la nature en creusant et/ou en imperméabilisant (par une surface d’argile ou par une maçonnerie étanche). Les moyens mis en œuvre devenaient alors importants.
L’alimentation en eau est garanti par les pluies, d’où une variation du niveau dans l’année, plus ou moins importante selon le climat. Un fonctionnement qui convient assez peu aux poissons mais beaucoup mieux aux amphibiens.
Comme les haies, les mares sont devenues un obstacle à la mécanisation et à la rationalisation du travail agricole. Les unes ont été arasées, les autres comblées, souvent de déchets, trop souvent polluants. Les mares qui ont le mieux subsisté sont les mares d’agrément — ainsi que les bassins à poissons qui sortent de notre sujet.
Heureusement, des communes, des associations et aussi des particuliers ont travaillé et travaillent à créer ou à entretenir des mares naturelles ou pédagogiques
Dans le prolongement du « Jardin naturel », nous promouvons la mare comme auxiliaire de jardin : « Un point d’eau dans un jardin est quasi-indispensable, pour que les oiseaux puissent s’y abreuver et s’y baigner. Une mare, agrémentée de plantes aquatiques, même de taille réduite, sera le centre d’intérêt de tous les animaux du jardin. Vous pourrez peut-être y observer grenouilles et libellules, ainsi que quelques mammifères qui viendront s’y désaltérer. Placez une planchette à cheval sur le bord de la mare, pour que les animaux tombés dans l’eau puissent s’en sortir […]. ». Pour l’exemple choisi, il s’agissait d’un bassin préformé qui trouve facilement sa place dans un petit jardin.
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un modèle possible
Surface : au moins 6 m², jusqu’à 20 m² et plus.
Profondeur : 1,2 m maximum
Pentes :
- un seul côté abrupt, accessoire d’ailleurs sur une grande mare, mais facilite l’entretien (accès pour nettoyage),
- un côté à paliers (20, 40, 80, 100 cm) avec une pente moyenne de 5-15° (toujours inférieure à 30°), et des dépressions pour mieux retenir la terre ; quelques pierres peuvent aider à fixer,
- côté à paliers sur le flanc nord pour mieux recevoir le soleil,
- possibilité d’anse, 2-3 cm de profondeur, si mare assez grande (sinon évaporation trop rapide), cette zone (1-2 m²) sera stérile (graviers, sable).
Sous-sol : - fonds en argile, bentonite, etc. :
— assez couteux pour la bentonite, idéal pour l’argile,
fonds imperméabilisé par une bâche :
— épaisseur de bâche supérieure à 1 mm (en PEHD mais craignant les UV, en EPDM ou en caoutchouc-butyle),
— structure générale (de bas en haut) :
- sol tassé et nettoyé des cailloux, arêtes? coupantes...
- grillage à mailles fines
- sable fin
- géotextile ou moquette ou vieux cartons humides
- bâche
- sable et graviers sur argile ou sur terre pauvre (couches de 5 à 15 cm), généralement 1/2 gravier, 1/4 sable et 1/4 terre.
Plantes : - choix envisageables (tenu compte de l’envahissement et des qualités épuratives et hébergeantes) :
- pieds dans l’eau : menthe aquatique (Mentha aquatica), très nectarifère? ; laîche (Carex ripania) ; iris faux-acore (Iris pseudacorus), jaune ;
- pleine eau : renoncule aquatique (Ranunculus aquatilis) ; cornifle (Ceratophyllum demersum) ; myriophylle (Myriophyllum spicatum) ; - possibilité d’utiliser des pots ou des bacs pour limiter le développement des rhizomes? des autres plantes plus envahissantes (massette, roseau, jonc, potamot). Pour élargir le choix : Les plantes régionales pour les mares, en annexe.
Alentours :
- prévoir une zone herbeuse (limite la pollution),
- prévoir du bois mort (pour l’hibernation de la faune),
- protéger des feuilles? mortes et de l’ombre.
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Les mares de jardin ne dépasseront pas 2 mètres de profondeur : au-delà, sauf dans des eaux mortes, la lumière solaire ne peut plus pénétrer. Par sécurité, il vaut mieux ne pas dépasser 1,20 mètre ; de plus peu de plantes sont utilisables au delà de cette profondeur. Les mares auront au moins 70 centimètres de profondeur pour garantir un volume d’eau hors gel. La surface peut varier de quelques décimètres carrés (avec un petit bassin thermoformé, donc peu profond) à quelques dizaines de mètres carrés.
Plus la mare est étendue et profonde, plus elle sera insensible à la sécheresse et au gel. Six à vingt mètres carrés, dont une partie à plus de 70 centimètres de profondeur est un bon choix :
— son inertie la protège des aléas climatiques normaux ;
— sa surface permet d’équilibrer plus sûrement la vie végétale.
La surface peut être moindre si l’on ne veut pas empiéter trop sur le jardin.
Les mares auront des paliers pour faciliter l’installation des plantes aquatiques. Le dernier palier aura une face en pente douce, de préférence au sud, pour aider la sortie des animaux qui s’y baignent ou qui y sont tombés. Sans cela, les noyades sont garanties pour ceux qui ne pourront pas grimper les 10-20 centimètres d’une rive souvent bâchée et donc glissante, en plus d’être verticale. Nous pourrons aussi aller plus loin et garantir cette pente depuis le palier qui connait les plus basses eaux.
Ces paliers seront aussi utiles aux humains qui tombent dans la mare. La face nord peut être plus abrupte pour bénéficier au maximum de l’apport solaire sur ces paliers. C’est au-delà de cette rive que nous allons planter les espèces? thermophiles (qui aiment le soleil) comme les thyms, romarins et beaucoup de lamiacées (labiées?). Surélevées et suffisamment éloignées pour garder les pieds au sec en hiver, elles profiteront ainsi de la réflexion du soleil sur l’eau.
On évitera aussi le surplomb par les arbres : leurs feuilles, en se décomposant, peuvent modifier l’acidité de l’eau et le travail d’entretien deviendra vite fastidieux.
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L’alimentation de la mare se fait par les eaux de pluie et peut être complétée de deux manières :
- Elle est installée sur un point bas du jardin. Elle reçoit donc une partie des eaux de ruissellement. Celà implique qu’il n’y ait pas de traitement chimique sur ce jardin car la mare serait perturbée par l’apport de molécules, naturelles ou artificielles, du traitement. Des espèces végétales ou animales peuvent alors disparaitre ou décliner, défaisant l’équilibre que nous essayons de créer. Nous devons aussi faire attention à l’apport de matière organique apporté par le ruissellement. La mare risque l’eutrophisation, c’est-à-dire un développement important d’algues et végétaux favorisé par l’excès d’azote qui va étouffer une partie de la vie. Nous laisserons une bande herbeuse pour filtrer le ruissellement.
- Elle est près d’un toit. Nous pouvons alors utiliser le trop plein de la récupération d’eau de pluie et le faire dériver sur la mare. Le passage préalable dans le récipient de récupération, installé pour l’arrosage ou d’autres usages, permet à l’eau de décanter (c’est-à-dire de déposer une partie des substances entrainées depuis les toits).
Il est prudent d’attendre quelques jours avant de planter les végétaux, le temps que la température s’équilibre.
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Les plantes peuvent être flottantes (nénufars, renoncules aquatiques..., plantes dites hydrophytes, d’eau) ou avoir leurs racines sous l’eau (iris, saule, carex, roseaux, massettes..., plantes dites hélophytes, de vase) et supporter les variations de niveau.
Le choix va s’adapter à la profondeur où nous pouvons les installer. Il s’agit d’une profondeur moyenne. En effet, les végétaux vont subir les variations, même minimes, du niveau de l’eau. Ces variations existent dans la nature et végétaux et animaux y sont adaptés et en ont parfois besoin pour mieux se développer. Nous devons juste limiter les variations qui sortent de l’ordinaire : par l’apport d’eau (ce qui est difficile en période de sécheresse), par l’évacuation du trop plein. Les abords de la mare, eux, recevront des plantes adaptées aux débordements et à l’humidité plus importante que dans le reste du jardin.
L’installation se fait de préférence dans des paniers qui permettent de contenir les espèces trop envahissantes et d’éventuellement les déplacer et de diviser nos plantes plus facilement.
Parallèlement à l’installation de notre choix de plantes, nous pouvons aussi « ensemencer » la mare. Il s’agit, à partir d’une mare souvent naturelle et non protégée mais dont la richesse biologique nous satisfait, de prélever une motte de terre et de l’émietter sur notre mare. Les micro organismes et les graines qui se plaisent vont rapidement se développer. Nous aurons ainsi un complément naturel et diversifié à notre choix.
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La vie animale va rapidement s’installer. Il est inutile de l’importer [3]. Les animaux viendront d’eux-mêmes s’ils sont installés dans le voisinage, sinon des oiseaux apporteront accidentellement des œufs.
Le présence de moustiques est rapidement limitée par l’installation naturelle de prédateurs (libellules, dytiques, amphibiens...) ; il n’y a pas besoin de poissons. La prolifération de moustiques est bien plus à craindre de par les eaux stagnantes de notre jardin (cuve de récupération, pots et brouettes non retournés, bâches et sacs qui trainent sous la pluie, etc.).
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La présence de jeunes enfants doit aussi être prise en compte avec des protections adaptées.
Claude Delattre